mercredi 16 janvier 2013

"Muséums" à Vannes



Prolongation de l'exposition à l'IUFM de Vannes jusqu'au 21 février.

Dont voici le texte de présentation écrit par André Scherb.




Maelle de Coux
« Muséum »
Installation avec photographies, dessins, montages d’images, livres documentaires et livres d’artiste, objets divers, animaux naturalisés.


Galerie de l’IUFM, site de Vannes, 32 avenue Roosevelt, 56000 VANNES
Exposition du 14 novembre au 15 décembre 2012
Prolongée jusqu’au 21 février 2013


La frontière entre art et science est fragile et les artistes contemporains n’ont de cesse de la déplacer. Déjà, les investigations pour comprendre et transformer le monde, de Léonard de Vinci, figure emblématique de l’artiste scientifique, se formalisent par le dessin.
Le dessin scrute le réel pour l’inventer, par une mise en forme inédite ou par la traduction d’un projet utopique.
Maëlle de Coux dessine et photographie des « bêtes » dit-elle, des oiseaux et autres animaux, pour en donner une représentation, pour en saisir le fonctionnement, pour les faire exister, mais aussi, au-delà de la forme apparente, pour en révéler la vie.
Le paradoxe du dessin, figé sur son support papier, c’est bien de pouvoir s’emparer de l’indicible du vivant, un défi auquel s’affrontent des artistes de toute époque. En s’approchant de l’apparence des choses, en réduisant au mieux l’écart qui sépare la représentation de son référent, lorsque la mimesis est parfaite, que découvrons-nous ?
Les animaux naturalisés présentés parmi les œuvres de Maëlle de Coux pourraient défier l’artiste en affirmant leur présence avec la force de leur réalité. Pourtant, ils nous placent face à une fascination du réel et a une sensation d’un manque essentiel, la vie.
En revanche, les photographies complétées par le dessin ou la peinture, les diverses esquisses, les croquis consignés dans des carnets, captent l’énergie du vivant et plus encore, sollicitent notre imaginaire. Ce dernier a été nourri d’images, des livres d’école, des livres scientifiques et d’images poétiques issues de lectures. L’artiste nous le rappelle en ouvrant sur sa table du chercheur une fable d’Esope, un poème de Baudelaire, un extrait de Kipling.
L’exposition Muséum à la Galerie de l’IUFM, à Vannes, place le spectateur dans un univers incertain. Les œuvres participent à une installation qui évoque le cabinet de curiosité, la salle de musée d’histoire naturelle ou le bureau d’un étrange collectionneur. Précédemment, Maëlle de Coux avait placé ses créations au cœur même de la mémoire scientifique, dans les salles des muséums d’histoire naturelle de Paris, de Nantes, de Bourges, de Blois.
L’artiste catalan Joan Fontcuberta, qui avait présenté ses œuvres fictionnelles dans un musée de zoologie (Fauna, 1989), nous avait habitués à douter de la véracité des photographies et des mécanismes qui produisent les « vérités » utilisés dans différentes institutions qui, comme les musées, informent et communiquent.
Maëlle de Coux n’adopte pas une telle attitude critique, mais parle volontiers de la relation intime, depuis son enfance, qu’elle entretient avec les lieux qui recèlent des trésors de connaissances, mais aussi d’images. Images qui continuent à se développer et à se métamorphoser à travers sa mémoire. Lieux qui nous racontent, dit-elle « l’histoire de la vie tout en nous montrant des choses mortes ».
Les portraits d’oiseaux proviennent de photographies en noir et blanc d’animaux naturalisés du muséum de Nantes et de Bourges, « réinventés » grâce au travail graphique et pictural. Charles Le Brun, au XVIIe siècle, avait par le dessin montré l’analogie entre les formes animales et les physionomies humaines. Maëlle de Coux révèle, à petite touche, le caractère anthropomorphe des oiseaux, faisant de chacun d’eux « le miroir de nos personnalités ». Elle accepte la « dérive scientifique » pour rejoindre la poésie et l’imaginaire.
La blancheur éclatante de la série des œufs ou la noirceur du gigantesque herbier dénommé « Adventices » montrent combien la lumière ou l’ombre altèrent et effacent ce qui pourrait nous documenter sur le vivant animal ou végétal. Notre regard mesure ainsi la vie à la distance parfois infime qui la sépare de la mort.

André Scherb
Novembre 2012



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